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Lu Shaye, nouvel Ambassadeur de Chine à Paris fustige les médias français. Regards sur la rigidité du pouvoir chinois

« La Chine ne négocie pas avec l’émeute »

A peine arrivé en France fin juillet pour y prendre mes nouvelles fonctions d’ambassadeur de Chine en France, j’ai pu voir dans les semaines suivantes, quantité de reportages ou de commentaires de la part des médias français sur la situation à Hong Kong dont certains m’ont semblé pour le moins déroutants. Tout d’abord, comment peut-on considérer des casseurs comme des démocrates ?

En marge des manifestations contre le projet de révision des règlements sur les extraditions du Gouvernement de la Région administrative spéciale (RAS) de Hong Kong, de nombreux actes de violence ont éclaté.

Des individus ont saccagé le siège du Conseil législatif, ont outragé le drapeau et les emblèmes nationaux, interrompu la circulation du métro, investi l’aéroport entraînant son blocage, séquestré et frappé touristes et journalistes innocents originaires du continent et ont profané la tombe des parents d’un député.

Des médias locaux, soi-disant « libéraux », ont propagé ouvertement la haine et insulté publiquement la cheffe de l’Exécutif en lui lançant : « Tu crèves quand ? ».

Face à de tels débordements de violence, n’importe quel dirigeant, n’importe quelle opinion publique, serait sans aucun doute partisan de la tolérance zéro. Alors, comment expliquer qu’à Hong Kong les violences aient pris les doux noms de « manifestations pacifiques » et de « mouvement pro-démocratie » ?

Ensuite, pourquoi si peu d’objectivité ? Le 17 août, des centaines de milliers de Hongkongais ont participé à un grand rassemblement pour dire « Non à la violence, sauvons Hong Kong ! ». L’événement passe quasiment inaperçu dans les médias d’ici. En revanche, le lendemain, une manifestation d’opposants est retransmise intégralement, en direct et avec commentaires en boucle. Et alors que la police estime à moins de 130 000 le nombre de manifestants, on nous raconte qu’ils étaient 1,7 million.

Face à des missions de maintien de l’ordre sous très haute tension, la police de Hong Kong a fait preuve d’une remarquable retenue. Un policier s’est fait arracher un doigt par un forcené qui l’a mordu. Un autre s’est vu acculé contre un mur et frappé par la foule. Pourtant, personne n’a songé à saluer leur professionnalisme et leur esprit de sacrifice.

Que dire aussi de l’histoire, abondamment relayée, de cette manifestante prétendument victime d’un tir policier de LBD, alors qu’en réalité, sa blessure à l’œil venait d’un coup tiré par son acolyte. Comment peut-on raconter à ce point n’importe quoi ?

Troisièmement, pourquoi il n’y a plus de liberté d’expression dès lors qu’on parle de Hong Kong ? Récemment, Twitter, Facebook et YouTube ont annoncé avoir fermé un certain nombre de comptes « soutenus par le Gouvernement chinois ». Mais les réseaux sociaux de Hong Kong regorgent de propos incitant à la violence contre les policiers et même à dévoiler leurs données personnelles. Et pourtant, à ma connaissance, aucun de ces comptes-là n’a été fermé.

En revanche, il suffit que les médias et les internautes du continent disent quelques vérités ou bien postent des vidéos des émeutes, pour qu’ils soient immédiatement bloqués.

La liberté ne peut justifier la violence et la démocratie n’est pas une excuse pour les émeutiers. La paix, le développement, l’équité et la justice sont des valeurs qui appartiennent à tous. Nulle part, sur ce point, il ne saurait y avoir « deux poids deux mesures ».

A Hong Kong, le Gouvernement central chinois s’en est toujours strictement tenu à sa politique dite « un pays, deux systèmes ». Cependant, le prérequis fondamental qu’il y ait « deux systèmes », est « un pays ».

Or, dès lorsqu’on nie le « un pays », qu’on porte atteinte à la souveraineté de la Chine, qu’on défie le Pouvoir central et l’autorité de la Loi fondamentale de Hong Kong, parler de « deux systèmes » devient sans objet.
Nous soutenons fermement l’Exécutif de Hong Kong dans l’exercice de ses prérogatives pour sauvegarder l’État de droit, rétablir l’ordre social et stopper ces violences criminelles.

Prétexter son opposition au projet de révision pour déstabiliser Hong Kong, porter atteinte à la souveraineté de la Chine, ou encore, se servir de Hong Kong pour fomenter des opérations d’infiltration et de sabotage sur le continent, est voué à l’échec.

Aujourd’hui, un nombre croissant de Hongkongais commence à mieux saisir la nature véritable de ce « mouvement de protestation ». Répéter mille fois un mensonge n’en fera jamais une vérité.

L’exemple vient d’en haut.

Pour Cui Hongjian, Directeur des études européennes à L’Institut des Relations Internationales dépendant du Waijiaobu, l’affectation de Lu Shaye à Paris montre qu’il est apprécié en haut lieu pour son travail au Canada. Ses prises de position à propos de Hong Kong rejetant toute négociation et stigmatisant la partialité des médias occidentaux, sont celles du Parti qui anticipe le discrédit des casseurs et le pourrissement du mouvement.

Plus largement, la stigmatisation des médias étrangers par des ambassadeurs chinois est homothétique de la plus grande influence globale de la Chine et de son refus affiché d’endosser les valeurs des démocraties occidentales dont l’indépendance de la justice et des médias.

Reporters sans frontières signalait dans un article du 17 juin, que l’Ambassadeur en Suède Gui Gongyou avait lui aussi sévèrement critiqué les journalistes.

Son cheval de bataille : Taïwan à propos d’un article paru sur SVT Nyheter, le principal portail d’informations numérique de Suède, ayant publié une tribune signée de David Liao le représentant Taïwanais à Stockholm qui plaidait pour la démocratie. En lui donnant la parole sur ce sujet disait Gui qui ignore la liberté et l’indépendance des médias, la Suède contrevenait gravement au principe « d’une seule Chine ».

Mais dans ce pays classé 177e sur 180 pour la liberté de la presse par RSF, l’exemple vient d’en haut. En 2016, le MAE Wang Yi en visite officielle au Canada avait publiquement qualifié « d’irresponsables » les questions d’une journaliste sur les droits de l’homme en Chine à propos du citoyen canadien Kevin Garrat qui tenait un café près de la frontière nord-coréenne et avait été détenu arbitrairement pendant un an (de 2014 à 2015).

La réponse crispée de Wang Yi fut un exemple de rigidité que Lu Shaye semble avoir pris pour modèle : « Je dois dire que votre question est pleine de préjugés contre la Chine et d’arrogance… Je ne sais pas d’où cela vient. C’est totalement inacceptable » (…) Aucun étranger ne connaît la situation des droits de l’homme en Chine mieux que le peuple chinois lui-même. Il est le mieux placé pour en parler ».


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