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›› Chronique

Le rail chinois, la corruption du ministre et les ramifications occultes d’un scandale

Il était ministre des chemins de fer depuis sept années et avait, au fil du temps, construit un empire tentaculaire, intégrant non seulement les technologies importées du Japon, d’Allemagne, de France et du Canada, mais également les savoir-faire en travaux publics les plus efficaces, les plus rapides, et les moins chers de la planète, dans lesquels les Chinois sont incontestablement passés maîtres.

L’irrésistible offre chinoise ternie par la corruption.

Entre ses mains, l’offre chinoise, financièrement imbattable - 3 à 5 fois moins chère que celle des concurrents japonais ou occidentaux -, est devenue irrésistible. Elle propose, en une seule et très efficace combinaison intégrale, un vaste ensemble de services et de compétences industrielles, qui vont de plans de financement à long terme jusqu’à la réalisation d’ouvrages d’art complexes, en passant par la vente d’équipement dotés de technologies importées dernier cri et habilement « sinisées » par le truchement de quelques modifications.

Présente partout dans le monde, en Asie, en Amérique du Sud, au Moyen Orient, en Afrique du Nord, en Bulgarie, en Turquie, en Russie et jusqu’en Californie, elle est capable de remporter des marchés contre ses anciens modèles occidentaux ou japonais, éberlués d’avoir été si vite dépassés sur leur propre terrain ; il est vrai que les offres de ces derniers sont, le plus souvent, éclatées entre les institutions financières pourvoyeurs de crédits, les bureaux d’études et les ingénieurs engagés dans de sévères concurrences industrielles et commerciales, et les entreprises de travaux publics aux coûts prohibitifs.

En dépit de ces succès planétaires qui avaient attiré l’attention du monde entier, Liu Zhijun (58 ans), ministre des chemins de fer depuis 2003, a été mis à pied et en examen le 12 février dernier. Cette disgrâce brutale, décidée par la commission de discipline du Parti, soulève plusieurs questions, non seulement sur la probité et la gestion du ministre, accusé de corruption massive dans un secteur où les malversations sont cependant monnaie courante, mais également sur la viabilité financière et technique à long terme des projets du rail chinois.

Enfin, comme à chaque fois qu’un haut dignitaire du régime tombe pour corruption (Chen Xitong, maire de Pékin, en 1995, et Chen Liangyu, Secrétaire du Parti de Shanghai en 2006, tous deux membres du Bureau Politique), resurgissent les spéculations sur les rivalités de factions et le partage des prébendes. Pour beaucoup d’observateurs en effet, l’accusation de corruption n’est jamais qu’un prétexte qui cache de sourdes rivalités d’intérêts, de personnes et de clans.

A part le communiqué de Xinhua, qui mentionne de « graves violations disciplinaires », allusion transparente et classique aux délits de corruption, rien n’a filtré des autres raisons pour lesquelles le Parti a si abruptement limogé le responsable national d’un projet aussi vaste et aussi emblématique de la Chine moderne.

Les déclarations de Sheng Guangzu, remplaçant de Liu, donnent une indication qui renvoie à des soucis de qualité et de sécurité, liés à la gestion de Liu Zhijun. Pour garder les projets dans les limites du budget et respecter les délais, ce dernier aurait, entre autres, accepté quelques arrangements sur la qualité des traverses en béton et du ballast, au point que les rails ne supporteraient pas la vitesse maximum d’exploitation de 350 km/h, au-delà de quelques années.


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