Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Politique intérieure

Xi Jinping est-il fragilisé à la tête de l’appareil ?

Le Quotidien du Peuple. Risques portés par la fermeture politique et le culte de la personnalité.

Au moment où la conférence de Yan Xuetong, critique à peine voilée d’une approche caricaturale des rapports avec l’Occident, stigmatisant « l’hubris » de la jeunesse était diffusée dans les milieux académiques chinois, aux États-Unis, Radio Free Asia, financée par le Congrès, toujours à l’affut de dissensions politiques internes en Chine, releva aussi l’absence insolite de toute mention de Xi Jinping dans un article du Quotidien du Peuple sur les réformes de Deng Xiaoping.

Signé de Qu Qingshan, Doyen de l’Institut de recherche et de documentation de l’École Centrale du parti, l’article de 4000 caractères faisait plusieurs allusions historiques pouvant être interprétées comme des critiques des actuelles rigidités de l’appareil, à la fois en politique intérieure et dans les relations internationales.

La référence au troisième plenum du 11e Congrès du Parti en 1978, cité en exemple, mettait notamment en exergue Bao Tong (89 ans), toujours en résidence surveillée à Pékin, un des rares soutiens intérieurs de Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix et dont le fils, Bao Pu, aujourd’hui citoyen américain, persona non grata en Chine, avait publié les mémoires de Zhao Ziyang à Hong Kong. Lire : Mémoires d’outre tombe de Zhao Ziyang.

En 1978, Bao Tong, âgé de 46 ans, alors Directeur du Bureau des réformes politiques, s’opposa à Deng Xiaoping qui tentait de museler les critiques. Ardent défenseur d’une société civile chinoise, il fut arrêté à Tian An Men onze ans plus tard, alors que depuis 1987, il occupait le poste stratégique de secrétaire général du Comité Permanent sous l’ère Zhao Ziyang.

En 2008, Bao Tong avait lui-même décrit l’effervescence du 3e plenum de 1978, comme une « réunion exceptionnellement animée ayant déclenché une réaction en chaîne de la société civile » (…) Il ajoutait que « toute l’impulsion vers les réformes avait jailli de ces échanges où tout le monde parlait en même temps ».

Ignorant Xi Jinping, le Quotidien du Peuple glosait aussi sur le fait que le processus de réforme économique et d’ouverture au monde furent le résultat des réflexions du parti sur les « graves lacunes », - notamment le culte de la personnalité de Mao (NDLR) -, ayant conduit à la catastrophe de la Révolution culturelle émaillée par le chaos « des dénonciations politiques suivies de détentions massives », alors que le pays était agité « de troubles sociaux et de violences entre factions dans les rues, que tentaient de réprimer des tribunaux fantoches ».

Surtout, ayant à plusieurs reprises souligné les appels aux réformes économiques de Deng Xiaoping, qualifiées « d’arme magique et de clés de l’avenir du pays », l’article du Quotidien du Peuple louait, les deux prédécesseurs de Xi Jinping, Jiang Zemin et Hu Jintao, pour les avoir mises en œuvre avec succès.

L’auteur accordait même une mention laudative à la théorie des « Trois représentativités » de Jiang Zemin, associant le dynamisme des entrepreneurs à l’appareil, « au milieu d’une situation internationale compliquée. »

La source de l’article se trouvant à l’École Centrale du Parti, cœur politique du régime, il est impossible de sous-estimer ce qui semble une critique non voilée de la méthode Xi Jinping, dangereusement agressive à l’extérieur et brutale à l’intérieur, autour d’un retour au culte de la personnalité dont l’appareil garde un souvenir cuisant.

En haussant l’analyse d’un étage on ne peut manquer de se souvenir que cette critique venant du centre nerveux du régime n’est pas la première. Le 3 juin 2020, Cai Xia, professeur de droit à la retraite de l’École Centrale du Parti avait depuis l’étranger fait diffuser en Chine un message enregistré de vingt minutes par lequel elle critiquait à la fois le système et le n°1 lui-même. Lire : Xi Jinping et Li Keqiang à couteaux tirés ? Un défi à la résilience de l’appareil.

En substance, pour elle, l’appareil où tout débat est devenu impossible, prétend fonctionner selon un système légal de plus en plus sophistiqué, mais il traite tous les opposants en s’affranchissant des lois. Cette « dualité » aboutit à créer, disait-elle, un « parti politique Zombie ». Sa féroce attaque se concentrait sur Xi Jinping lui-même, au point qu’elle appelait même le parti à le démettre.


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

L’appareil fait l’impasse du 3e plénum. Décryptage

A Hong-Kong, l’obsession de mise au pas

Pour l’appareil, « Noël » est une fête occidentale dont la célébration est à proscrire

Décès de Li Keqiang. Disparition d’un réformateur compètent et discret, marginalisé par Xi Jinping

Xi Jinping, l’APL et la trace rémanente des « Immortels » du Parti