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Modernisation de l’industrie lourde, « Chine 2025 » et transferts de technologies

Récemment le ministère de l’industrie et des technologies de l’information, dirigé par Miao Wei, 68 ans, membre du Comité Central, ancien PDG de Dongfeng Motors qu’il avait réussi à redresser en imposant des techniques de management occidentales, a publié un plan d’action global de restructuration de l’industrie lourde.

Les objectifs à la fois ambitieux et « inclusifs » visent d’ici 2025 :

1) A placer la Chine à la tête mondiale des industries de fonderie et de forgeage haut de gamme [1] ;

2) A réduire la pollution par les particules fines de plus de 30% et à diminuer la consommation d’énergie par tonne de matériaux forgés de 5% par rapport à 2020 ;

3) A encourager les groupes publics à intégrer les technologies digitales pour améliorer la qualité de la production ;

et 4) A inciter les entreprises étrangères à établir en Chine des centres de R&D en liaison avec les groupes publics chinois.

Sur le sujet de l’industrie lourde, l’Institut allemand de recherche sur la Chine, MERCATOR rappelle que La Chine est depuis vingt ans le plus vaste secteur au monde de fonderie et de forgeage mais qu’il est éclaté et mal coordonné et que les produits haut-de-gamme qu’il utilise sont principalement importés.

L’ambition du ministre est d’aider les groupes publics à se placer au sommet des chaînes de valeur mondiale, à moderniser les secteurs en aval comme l’aviation, l’automobile, les machines et équipements industriels, et à améliorer la résilience industrielle du secteur face à la concurrence.

Il reste que pour l’heure, les entreprises européennes sont des leaders mondiaux dans les segments à forte valeur ajoutée des industries de la fonderie et du forgeage, tandis que les entreprises chinoises recherchent la coopération des groupes étrangers pour le transfert des technologies haut de gamme.

Une intention affichée de captation de technologies.

La stratégie à double face qui consiste à attirer les entreprises de haute technologies étrangères pour aider à la modernisation industrielle a rarement été aussi transparente.

Elle prévoit des incitations financières et politiques aux entreprises européennes pour qu’elles localisent leurs installations de production et de R&D en Chine. En même temps, obligeant aux transferts de technologies par les coopérations de recherche, elle annonce que son objectif est de réduire la dépendance chinoise aux technologies étrangères.

Alors que le plan du ministre fait clairement le lien entre les obligations de co-entreprises, les transferts de technologies et l’indépendance haut-de-gamme de la Chine inscrite dans le plan « China 2025  », il faut revenir sur la question au cœur des tensions entre Pékin et Washington des « Transferts Forcés de Technologies (TFT) ».

*

La pratique est ancienne. Lorsqu’une entreprise souhaite entrer sur le marché chinois, le gouvernement peut l’obliger à transférer sa technologie sensible à des entreprises locales avec lesquelles elle doit créer une « co-entreprise  » dont la maison-mère chinoise deviendra plus tard sa concurrente sur le marché global avec un avantage de prix imbattable.

L’objectif de «  China 2025 » est sans ambiguïté. Il s’agit d’élever le statut industriel du pays du niveau de l’assemblage à celui d’inventeur et de développeur de ses propres produits.

A cet effet, dès 2015, la stratégie qui touche à la question sensible de la propriété intellectuelle avait défini dix secteurs clés, légalement protégés par les brevets, les droits d’auteur, les marques et les franchises.

Définissant clairement les priorités industrielles de la modernisation du pays, l’effort va des nouvelles technologies de l’information, y compris les logiciels (rajoutés en 2018), des machines-outils pilotées par ordinateur dont les machines agricoles modernes, aux nouveaux matériaux et à la biomédecine, en passant par l’aérospatiale, les navires océaniques haut de gamme et les vastes domaines des transports (rail, véhicules électriques, aviation civile moyen et long courrier).

En 2018, le gouvernement avait ajouté à la liste les microprocesseurs, les logiciels industriels et les systèmes d’exploitation. Son ambition était que d’ici 2025, la robotique chinoise et les véhicules à faible consommation d’énergie et à faible pollution dominent le marché mondial.

Alors que les Chinois les avaient accusés de refuser le partage de la connaissance et de la recherche scientifique dont ils disent qu’il est « la condition des progrès de l’humanité  », les Américains avaient, dès 2018, instauré des taxes aux produits portant le label « Made in China 2025 » et augmenté les mesures de contrôle des échanges académiques et des investissements.

*

Le degré d’alerte vient d’être augmenté par un rapport alarmant de l’Institut australien de stratégies politiques (ASPI), payé par le département d’État américain, estimant que la Chine était en tête dans 37 des 44 technologies émergentes.

Notamment les domaines de la défense, de l’espace, de la robotique, de l’énergie, de l’intelligence artificielle, de la biotechnologie et des nouveaux matériaux.

En dépit du fait que l’Amérique domine toujours les secteurs des ordinateurs quantiques haute performance, des satellites et des vaccins, le rapport, s’appuyant sur le fait que les dix premiers centres de recherche de la planète sont chinois, écrit que les pays occidentaux sont en train de perdre la compétition technologique globale, en particulier la course à l’innovation scientifique.

Alors que Pékin a réagi en l’accusant d’être anti-chinois, l’Institut dont le financement vient en partie des États-Unis, appelle les démocraties à mieux coopérer entre elles pour protéger leurs chaînes de valeurs et à augmenter rapidement leurs investissements en R&D.

Un des points qui n’aura pas manqué d’éveiller la défiance des systèmes de sécurité occidentaux confrontés à un regain d’agressivité anti-occidentale est que, traçant les itinéraires des chercheurs chinois, le rapport conclut que leur expertise a, pour 20% d’entre eux, été acquise dans les universités des « Five Eyes  » (États-Unis, Australie, Canada, Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni. ).

Note(s) :

[1La forge haut de gamme permet d’affiner la structure granulaire du matériau, principalement des métaux et alliages, d’améliorer les propriétés mécaniques du composant pour renforcer sa solidité. Des presses et pilons complexes sont utilisés pour déformer les matériaux et obtenir la forme souhaitée.


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