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L’instabilité historique de la frontière sino-birmane. La longue patience de Pékin. Crises de migrants et diaspora chinoise dans l’ASEAN

Un vaste exercice interarmées de l’APL, incluant des chasseurs de combat, des hélicoptères, des unités blindées et de l’artillerie a lieu depuis la fin mars le long de la frontière birmane. La dernière fois qu’une manœuvre de cette ampleur avait été organisée c’était en 2015 quand l’armée birmane avait tiré par erreur des obus sur le village frontière de Dashui Sangshu 大水桑树 tuant plusieurs fermiers chinois.

Cette fois, la démonstration de force – la plus importante depuis 30 ans selon le Global Times – se déroule après plusieurs offensives de l’armée birmane déclenchées à l’automne dernier contre les forces indépendantes de l’État de Kachin, provoquant la fuite de près de 25 000 réfugiés vers le Yunnan.

A côté des manœuvres à la frontière, le gouvernement chinois fait pression sur Naypidaw pour tenter de faire cesser les combats en condamnant la prise en otage de populations civiles 中方对冲突殃及无辜平民表示谴责 (Conférence du Waijiaobu du 9 mars). En même temps, il exhorte Naypidaw à maintenir la stabilité de la frontière. 采取有效措施维护边境地区稳定。

Peine perdue. Les militaires birmans dont le pouvoir est resté intact en dépit de l’arrivée gouvernement d’Aung San Suu Kyi n’abandonneront pas leur combat contre les séparatistes. Au moins 200 civils et militaires des deux bords ont été tués depuis le mois de novembre.

Début mars, des combats sporadiques ont encore éclaté dans la région de Kokang sur la frontière de l’État Shan après qu’une trentaine de miliciens de l’Alliance démocratique aient attaqué des bâtiments de la police et de l’armée. Au cours de l’accrochage une trentaine de personnes civiles et militaires ont été tuées des deux côtés. Le 5 mars une vingtaine d’obus sont encore tombés en territoire chinois et un millier de réfugiés ont pris la route à partir de Laukkai vers les camps de réfugiés installés au Yunnan.

Difficile manœuvre diplomatique chinoise.

Pékin qui affiche ses principes de non interférence est en réalité tiraillé entre les groupes rebelles (Armée indépendante de Kachin, l’armée WA – United Wa Army-, armée de Kokang) dont les liens historiques et économiques avec la Chine sont anciens (lire : Chine-Myanmar : le dilemme birman.) et, d’autre part, le gouvernement de Naypidaw où le pouvoir réel est resté aux mains de l’armée.

Compte tenu de la détermination des militaires birmans et de l’irrédentisme des rebelles, la marge de manœuvre chinoise est réduite et se limite pour l’heure à tenter, avec Aung Saung Suu Kyi, de jouer le rôle modérateur, non sans un certain succès. En 2016, Pékin a même réussi à persuader certains groupes rebelles de s’asseoir à la table des négociations.

Pour autant, l’analyse chinoise de la situation ne se paye pas de mots. Elle reste pessimiste et ne prévoit aucune amélioration de la situation dans un futur proche, d’autant que nombre de groupes rebelles continuent à recevoir le soutien de groupes d’intérêts chinois le long de la frontière quand ce n’est pas directement des pouvoirs locaux chinois au Yunnan, étroitement connectés au commerce de bois et, derrière le rideau, aux trafics d’armes et de drogue.

Compte tenu de l’importance stratégique du Myanmar, principal débouché du sud-ouest chinois vers le golfe du Bengale et raccourci terrestre de l’acheminement des hydrocarbures évitant les détroits de Malacca, Pékin dont l’influence s’est récemment heurtée à des réactions de rejet populaire contre la trop forte emprise de ses projets, notamment miniers et hydroélectriques, s’efforcera de garder ouvertes toutes les options politiques et tous les canaux.

S’étant rapprochée de la « Dame de Rangoon », la diplomatie chinoise ménage aussi, sans surprise, tous ses contacts, non seulement avec les officiers de l’armée birmane, mais également, par le biais de ses canaux occultes au Yunnan, avec les rebelles, pour la plupart appartenant ou liés à la minorité ethnique chinoise.

Une crise de migrants chinoise.

Enfin, les troubles au nord-est du Myanmar, le long de la frontière chinoise, dans un pays où le nombre de minorités est considérable (les recensements en comptent 135), sont en train de créer en Chine un problème de migrants et un débat sur les réseaux sociaux. Récemment des internautes ont reproché au gouvernement de ne pas se mettre en mesure d’accueillir efficacement et dans la durée les réfugiés birmans.

En réponse, le Bureau Politique, utilisant le réseau de la nébuleuse Phoenix Media, basée à Hong Kong diffusant en Chinois et en Anglais à l’intention des auditeurs chinois dans le monde entier, a remis la question en perspective, se référant à l’accueil des migrants ethniques chinois ayant fui le Vietnam et quelques pays de l’Asie du Sud-est dans les années 50 et 70 et, dernièrement en 1979 (260 000 réfugiés) suite au conflit sino-vietnamien après l’invasion du Cambodge par Hanoi.

On notera cependant qu’il s’agissait toujours d’expatriés chinois, installés depuis plus ou moins longtemps dans les pays de l’ASEAN fuyant leur pays d’adoption à la suite de menées populaires antichinoises conséquences de la domination d’affaires exercée par la minorité chinoise.


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