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Un tunnel sous-marin dans le Détroit. Faut-il s’en inquiéter ?

Xi Jinping sur les traces de Yu le Grand et de Mao.

Xi Jinping dont tout indique qu’il sera reconduit à la tête de l’appareil en 2022 et qu’il pourrait y rester jusqu’en 2035 – il aura alors 82 ans et aurait alors transgressé toutes les règles de succession héritées de Deng – ferait de la question explosive de la réunification avec Taïwan son projet emblématique de la grandeur de la Chine moderne, homothétique de celui Maoïste des « Trois Gorges » il y a trois quarts de siècles.

Le jour même de l’annonce du projet de liaison sous-marine qui rattacherait l’Île au Continent, Pékin imposait un embargo sur les ananas taïwanais, frappant directement les fermiers de l’Île dont la majeure partie de la production est exportée vers la Chine. Le durcissement commercial prenait le contrepied du modus-vivendi en vigueur depuis Hu Jintao.

Un témoin du Parti raconte que, durant les longues années passées au Fujian de 1985 à 1988 comme Vice-maire de Xiamen, puis de 1995 à 2002 avec la charge de nº2 politique de la province et Commissaire politique de la Division d’artillerie du Fujian à Fuzhou, Xi avait fréquemment visité les rivages de Pingtan qui, dit-on « semblaient être une de ses excursions préférées ».

Il n’est pas anodin, ajoute Nikkei, que les projets de développement de la zone de Pingtan aient pris corps quand Xi est arrivé à la tête du Parti en 2012.

Le rêve d’unification recèle cependant une différence notable avec le songe maoïste des « trois gorges ». Alors qu’aujourd’hui Taïwan est devenue le symbole de la démocratie et d’un projet de rupture avec le Continent, Tsai Ing-wen harcelée par Pékin brandit l’emblème global de la résistance des pays libres contre les autocrates.

La force du rejet taïwanais.

Lors de son investiture pour son deuxième mandat en janvier dernier, elle avait défié Pékin : « J’espère que les autorités à Pékin comprendront que Taïwan, pays démocratique, et notre gouvernement démocratiquement élu, ne céderont pas aux menaces et à l’intimidation  ».

La méfiance de la population de l’Île notamment des plus jeunes face aux pressions de rapprochement sous couvert d’accords commerciaux s’était déjà manifestée au printemps 2014, par l’occupation du Yuan législatif durant trois semaines par des étudiants dont la protestation est restée dans les mémoires sous le nom de mouvement des tournesols.

Soutenus par l’ancien président de la République Lee Teng-hui issu du KMT et devenu un féroce soutien de la cause indépendantiste et par Wang Jin-pying, le Président du Yuan législatif lui-même, accompagnés par nombre de professeurs d’universités et des représentants de la société civile, ils protestaient contre la signature de l’accord sur les services entre les deux rives, conclu sans véritable supervision du parlement.

Après les échauffourées qui mirent plusieurs centaines de milliers de personnes dans la rue, Chen Wei-ting, représentant des étudiants avait réitéré ses deux principales exigences imposant que la relation dans le Détroit soit plus étroitement surveillée par le parlement : 1) Créer une commission chargée de superviser les relations avec la Chine ; 2) Attendre pour la ratification du pacte que la commission ait examiné le pacte et donné son avis.

Quel que soit l’angle de vue, force est de constater que l’empressement de Pékin, favorisé par Ma Ying-jeou, avait provoqué une puissante réaction adverse de défiance au Continent et ouvert la voie à l’élection de Tsai Ing-wen deux années plus tard. Lire : Taïwan : Craquements politiques dans l’accord cadre. Les stratégies chinoises en question.

La très lourde « carte  » d’une agression militaire.

Le durcissement militaire chinois dans les parages du Détroit devenu plus démonstratif avec le survol répété d’avions chasse et de bombardiers franchissant à l’occasion la ligne médiane du Détroit, considérée comme la frontière informelle entre l’île et le Continent, entraîne mécaniquement des alertes de plus en plus explicites de l’appareil militaire américain.

Récemment, l’Amiral Aquilino, futur commandant du secteur « Indo-Pacifique » expliquait à la Commission des forces armées du Sénat que la menace militaire chinoise contre Taïwan pourrait s’exprimer d’ici un délai de six ans, beaucoup plus tôt que ne l’avaient estimé les stratèges américains. Il précisait « je vois une posture et la mise en place de systèmes d’armes et de capacités indiquant qu’ils songent à une agression ».

Les militaires américains en première ligne grossissent peut-être le trait dans le but d’obtenir des crédits. De leur point de vue, il est en effet prudent de se préparer au pire. Pour autant si on examine le risque d’explosion armée dans le Détroit du point de vue de certaines voix autorisées du sérail militaire chinois, la catastrophe apparaît moins imminente.

Au printemps dernier, le Général à la retraite Qiao Liang – auteur avec un de ses collègues de l’armée de l’air de « La guerre sans limites » suggérait que la variable hypothétique américaine était telle, que jouer la carte d’une agression militaire directe contre Taïwan comporterait un risque inacceptable pour l’appareil.

En cas d’échec dont il est imprudent de ne pas considérer l’éventualité, le Parti dit-il risquait de compromettre son rêve de retour de puissance.

Lire à ce sujet le § « Les dangers de l’obsession de souveraineté et les risques d’un conflit militaire. » de notre article : La Chine agressive et conquérante. Puissance, fragilités et contrefeux. Réflexion sur les risques de guerre


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