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›› Politique intérieure

A Hong Kong, la justice met fin à l’indulgence

Il fallait s’y attendre à Hong Kong, la justice glisse vers une jurisprudence plus répressive dans la foulée de l’élection avec 65% des voix à la Commission électorale de Carrrie Lam, favorite de Pékin, femme de caractère, parfois considérée comme arrogante, inflexible dans les négociations et à la loyauté chinoise sans faille, alors qu’en Chine, le politburo qui durcit la répression contre les critiques, s’inquiète de la naissance dans la R.A.S d’une mouvance politique de rupture prônant l’indépendance du Territoire sous couvert de « localisme ».

Prison ferme pour trois activistes de Central.

Le 17 août, Joshua Wong, Nathan Law et Alex Chow ont été condamnés à 8 mois de prison ferme et 5 années de privation de droits civiques.

Joshua Wong et Nathan Law sont deux des fondateurs du parti « Demosisto » (du latin « demos », le peuple et « sisto », volonté) qui réclame un référendum en 2047, date de la rétrocession complète du Territoire à la Chine, pour, en contradiction avec les accords de 1984 avec Londres, décider de l’avenir de Hong Kong. Alex Chow, président de la fédération des étudiants, est comme ses deux camarades, un activiste de la désobéissance civile.

Les trois ont été jugés coupables d’avoir été à l’origine du mouvement « Occupy Central » qui, pendant 79 jours en 2014, avait investi la place des droits civiques (Civic Square) devant le siège du gouvernement du Territoire. Le mouvement protestait contre le refus de Pékin d’instaurer un suffrage universel authentique pour l’élection du gouverneur.

Durcissement judiciaire.

Un premier symptôme du durcissement judiciaire eut lieu 48 heures avant les sentence contre les organisateurs de ce qui devint le « mouvement des parapluies », quand les 13 activistes qui, le 13 juin 2014, avaient violemment fait intrusion dans les locaux du Conseil Législatif, le parlement du Territoire pour protester contre les évictions prévues par le plan d’urbanisme des Nouveaux Territoires, furent condamnés à 13 mois de prison ferme. La sentence durcie faisait, après l’appel du ministère public, suite à un premier jugement plus clément.

En 2016, un juge d’une cour intermédiaire ne les avait condamnés qu’à 150 heures de travaux d’intérêt général après avoir reconnu qu’ils se battaient pour une « cause noble » et faisaient preuve d’altruisme pour protéger les plus faibles.

Depuis cette date, l’ambiance et les rapports de forces politiques ont changé.

Le spectre de l’indépendance.

Prenant conscience du risque posé par une situation où la liberté d’expression reconnue par les « Deux systèmes » autorisait la promotion d’une rupture politique complète avec Pékin, le pouvoir central s’est raidi. Récemment, il a répété par la bouche de Xi Jinping venu à Hong Kong le 1er juillet pour présider à l’investiture de Carrie Lam et après Zhang Dejiang président de l’ANP un mois avant, que l’autonomie ne saurait aller jusqu’à défier l’autorité de Pékin.

Quant à l’instauration d’un suffrage universel ne faisant pas le tri préalable des candidats selon les critères d’allégeance à Pékin, objet des manifestations d’Occupy Central qui vient de conduire les trois activistes en prison, elle entre dans la catégorie des réformes improbables.

Voyant dans l’exigence d’un scrutin totalement libre par les jeunes étudiants et la mouvance démocrate, l’influence des menées de Washington et de ses ONG de promotion des droits tels que National Democratic Endeavour et sa filiale National Democratic Institution actives à Hong Kong depuis 1997 et financées par le Congrès des États-Unis, le Bureau Politique ne prendra jamais le risque d’autoriser une candidature suspecte de nourrir un opposition à Pékin.

Contrairement à ceux qui, dans les médias occidentaux jugent que le parti communiste chinois arc-bouté à ses positions n’est pas prêt à un compromis électoral, Pékin affirme que sa proposition de « suffrage universel aménagé », rejetée en juin 2015 par le Conseil Législatif, était un pas vers l’adoption ultérieure d’un scrutin entièrement libre et une première étape vers le respect des dispositions de la Loi Fondamentale (Basic Law), prescrivant l’adoption à terme du suffrage universel pour l’élection du gouverneur.

Dans ces conditions, et tel était en partie le sens des discours de Zhang Dejiang et Xi Jinping en mai et juillet derniers, Pékin considère que, désormais, de nouvelles manifestations pour la promotion du suffrage universel n’avaient plus lieu d’être et constituaient « une menace pour la souveraineté chinoise. »

Raidissement politique de Pékin.

En septembre 2016 un rapport de l’ONG américaine NDI qui évaluait les perspectives de démocratisation de la R.A.S de Hong Kong, agitait un chiffon rouge sous le nez du régime chinois.

L’analyse a contribué au durcissement ayant conduit à la condamnation des trois étudiants rebelles. Ces derniers ont non seulement défié Pékin et les autorités du Territoire en appelant à la désobéissance civile à « Central », mais deux d’entre eux, Joshua Wong et Nathan Law, sont membres de Demosisto.

Créé en 2016, le mouvement qui appelle à un référendum en 2047 pour décider de l’appartenance ou non de Hong Kong à la Chine, a, bien que très minoritaire, allumé une mèche lente dont le crépitement perturbe l’ordonnancement de la rétrocession organisé par Londres et Pékin en 1984.

Dans un article publié trois jours après le jugement, le Global Times aligné sur Quotidien du Peuple estimait que la sentence contre les jeunes activistes était trop magnanime pour des actions ayant « mis en cause la sécurité publique, perturbé la vie des citoyens et provoqué d’importantes pertes économiques ».

Il dénonçait la vision biaisée des médias occidentaux qui stigmatisent la justice aux ordres du pouvoir, la réduction des libertés publiques et d’expression, mettant en danger la marche vers la démocratie. L’analyse prenait spécialement pour cible un article du New-York Times qui suggérait l’attribution du Prix Nobel aux trois jeunes militants.

Mais pour l’auteur, les accusations retenues par la cour de Hong Kong n’étaient pas une atteinte à la liberté d’expression. Elles sanctionnaient de graves manquements à la loi que la justice devait punir « sous peine d’ouvrir la voie aux chaos social »… « Que deviendrait l’ordre social si chaque mécontent occupait les rues sans avoir à en payer le prix ? ».

Au demeurant, ajoute l’article, aux États-Unis, « la police a aussi arrêté 27 manifestants qui, à Boston, protestaient contre l’extrême droite. » Et cette conclusion : « en dénonçant avec tant de force le jugement de Hong Kong, les médias occidentaux, ne favorisent pas la démocratie, mais la mettent en danger ».

Il reste que les harcèlements dont furent victimes les trois étudiants, donnent la mesure des inquiétudes que le surgissement d’une mouvance politique hostile à Pékin a fait naître dans le sérail politique chinois, alors même qu’à Taïwan l’élection de l’indépendantiste Tsai Ing-wen installait aux portes de la Chine un front démocratique clairement opposé à la réunification. Curieusement, à Hong Kong c’est Joshua Wang, le plus jeune qui, avant son son incarcération, dut essuyer les plus blessantes avanies.


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