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›› Editorial

L’année du Buffle, marchepied de Xi Jinping vers un 3e mandat au 20e Congrès

L’année du Buffle commencée le 12 février sera cruciale pour le Parti. Placée sous le deuxième signe du zodiaque chinois après le Rat, elle est l’antichambre politique du 20e Congrès qui, à l’automne 2022, année du Tigre, verra le renouvellement de la pyramide politique du pays.

La relève sera cependant taillée sur mesure pour Xi Jinping, puisque, cette fois, elle est surplombée par la quasi-certitude que le Président a l’intention de se maintenir à tête de l’appareil pour un 3e mandat. A cet effet, le Buffle sera logiquement l’année des bilans éclatants du Parti dont on fêtera le centenaire de la création en 1921, dans la concession française de Shanghai.

Les glorifications de l’histoire célébrant l’épopée des origines et les succès de l’appareil à la tête de la Chine accompagneront l’enterrement définitif des concepts de « direction collégiale » (集体领导) et de limitation des mandats (任期限) dont la mise en œuvre pratique avait atteint son apogée avec Hu Jintao, n°1 du Parti et Président de 2002 à 2012.

Héritages politiques de Deng Xiaoping qui redoutait le culte de la personnalité et le retour des luttes de clans, ces limitations ont été remplacées par l’omnipotent « cœur du Parti - 核心领导 » incarné par Xi Jinping, dont, après dix ans de pouvoir et en l’absence de successeur reconnu, la fin des mandats ne sera pas, sauf accident politique, à l’ordre du jour en 2022.

En 2021, marchepied pour le troisième mandat de Xi Jinping, le discours officiel sera articulé à la promotion des performances de l’appareil, avec un œil sur l’épopée des origines. Il se projettera aussi vers l’avenir symbolisé par le deuxième des « deux centenaires 两个一百年- Liang Ge Yibai Nian - », en 2049, anniversaire de la prise de pouvoir du Parti et échéance fixée par Xi Jinping pour la réalisation du rêve 中国梦 de retour de puissance de la Chine 复兴 à hauteur d’une puissance globale.

Depuis le 19e Congrès de l’automne 2017, quand « la pensée de Xi Jinping - 习近平思想 » fut consacrée par le vote unanime des 2300 délégués, les intentions du Parti sont claires.

Exprimées à l’occasion des réunions plénières du Comité Central que sont les « Plenum » et inscrites dans le 14e Plan quinquennal, elles dessinent le chemin du retour de puissance de la Chine, articulé aux « caractéristiques chinoises ».

Affichant un nationalisme souverain anti-occidental, réveillant parfois – notamment à propos de la question de Hong Kong – la mémoire des humiliations infligées à la Chine au XIXe siècle par l’Occident, la rhétorique du régime enflammant le patriotisme populaire donne le sentiment qu’il cherche une revanche historique.

Tel est l’arrière-plan idéologique du Parti à l’orée de l’année du Buffle. Mais comme le souligne dans Sinocism Charles Parton, ancien diplomate britannique à Hong Kong et Taïwan, qui fut aussi conseiller pour les Affaires chinoises au parlement britannique, le discours du Parti, plus que jamais submergé par la propagande, ne reflète pas la réalité de la Chine.

Assez souvent, au-delà du réalisme des rapports internes de l’appareil, la prévalence de l’idéologie et le souci des apparences qui transparaissent dans le discours public, produisent d’importantes dichotomies entre la narration officielle et la réalité.

*

Dominant désormais de manière répétitive les déclarations du Parti, sa pensée politique s’adosse à trois exigences qui fondent l’idée que le régime se fait de la stabilité et des progrès de la Chine : 1) La consolidation du pouvoir de Xi Jinping, n°1 du Parti ; 2) L’amélioration des performances de l’appareil et de sa bureaucratie ; 3) Les réformes « de gouvernance » dont les objectifs n’envisagent pas la liberté politique, mais seulement l’amélioration du niveau de vie d’un nombre toujours plus grand de Chinois.

Le but est la création d’une base politique aussi large que possible de soutien à l’appareil dont la pensée est toujours adossée à « l’idée de centralisme démocratique » où seule est autorisée la contestation des moyens, à l’exclusion de toute remise en cause de la légitimité du Parti à la tête de la Chine, dont les manifestations sont sévèrement réprimées.
Soucis socio-économiques.

Avec les déclarations des « Plénums » du 19e Congrès - ce sont les termes du 14e plan quinquennal (2021 – 2025) qui confirment le mieux les intentions du parti.

Moderniser et améliorer l’efficacité de l’appareil

Elles vont de la modernisation de l’APL commencée par les restructurations de 2015 à poursuivre encore de longues années (lire à ce sujet : La grande remise à niveau opérationnelle des armées. (Suite)) aux étapes devant conduire, à l’échéance du centenaire de 2049, qui verra la naissance d’un « puissant pays socialiste moderne 现代社会主义强国 », en passant par l’étape intermédiaire d’une « société à revenus moyens – 小康 社会 - », évalués à 20 000 $ par habitant, soit une hausse de 16% par rapport à l’actuel niveau.

Logiquement, l’accent est socio-économique. La prévalence a été exprimée par la dernière conférence économique centrale de décembre 2020 dont les compte-rendus publics ont défini huit priorités.

Avec, toujours, la volonté affichée de réforme et d’ouverture, elles vont du renforcement des capacités technologiques et du contrôle des chaînes autonomes de production, aux efforts pour atteindre la neutralité carbone, cependant pas envisagée avant 2060, après un « pic » en 2030, en passant par les défis liés à la faiblesse des surfaces cultivables et au manque d’eau au nord du pays.

Une mention spéciale évoquait les inquiétudes véhiculées par la naissance de monopoles, l’accumulation désordonnée de capitaux (une référence à la mise au pas de Jack Ma), la persistance des dettes et, résultat du prix exorbitant des loyers, de la crise du logement dans les grands centres urbains.

En examinant l’année écoulée, marquée par l’explosion de la pandémie à Wuhan ayant, en février, ébranlé la confiance populaire dans l’appareil, on perçoit à quel point la réalisation des objectifs officiellement affichés constituera un important défi.

Au-delà des communiqués du BNS souvent répétés par les médias d’une reprise plus rapide de la croissance, la Chine étant la seule grande économie à pouvoir afficher une croissance positive supérieure à 2%, le parti lui-même le reconnaît dans son rapport du 5e plenum du mois d’octobre (lire : 5e plenum. La quête d’autosuffisance. A la gloire de Xi Jinping vers un 3e mandat), bilan du 13e Plan.

« Le développement est qualitativement inégal – notamment entre les campagnes et les zones urbaines - ; les réformes dans certains secteurs clés restent difficiles ; l’innovation est en retard en dépit du succès du programme spatial (station spatiale et exploration lunaire, lire : La sonde Chang’e 5 s’est posée sur la lune) ; la protection écologique laisse à désirer ; les protections sociales restent faibles. »

La liste des difficultés énumérées pouvait, en arrière-plan, se référer à la crainte de l’appareil d’une déstabilisation sociale et politique qu’il tente de tenir à distance en augmentant la puissance de surveillance de la société par le développement du système orwellien de « crédit social » et par les récentes campagnes de rectification de la police et de la justice.

Lire :
- Le crédit social. De l’utopie vertueuse à « Big Brother ».
et
- Sévère campagne de rectification de l’appareil de sécurité.


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