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›› Editorial

A Ryad, la Chine anti-occidentale et dépendante du pétrole arabe ébranle l’ambiguïté de la prévalence américaine

Alors que les tensions sino-américaines sont attisées par la violente guerre technologique des microprocesseurs portée au rouge par Washington, la longue visite du Président Xi Jinping, en Arabie Saoudite du 7 au 9 décembre a jeté un pavé dans la marre de la plus ancienne et plus contradictoire des positions acquises américaines au Moyen Orient.

Elle est le résultat d’un accord stratégique de défense insolite conclu en 1951 et confirmé au fil du temps, malgré quelques sérieuses volte-face de Ryad. Son épine dorsale est la séparation poussée à ses extrêmes entre les substrats culturels et les intérêts bien compris où se croisent les exigences de sécurité de Ryad et le souci de stabilité des approvisionnements en pétrole de l’Amérique.

La connivence des intérêts, arrière-plan pragmatique de l’alliance entre Washington, cultivant son image de temple de la démocratie globale et une monarchie islamique radicale, constitue un exemple chimiquement pur du réalisme stratégique, dont la pérennité est affaiblie par le mouvement du monde.

Concrètement, le pragmatisme acrobatique de l’accord stipule des garanties de sécurité américaines accordées à Ryad contre l’Iran et ses alliés de la région, en échange de la stabilité des flux pétroliers.

En même temps, il jette un voile sur les contrastes politiques des deux régimes et les hésitations de Ryad qui, en 1973, à l’occasion de la guerre du Kippour, s’était joint à l’embargo sur le pétrole imposé à Washington et à l’Europe.

Aujourd’hui, la longue visite de Xi Jinping en Arabie saoudite catalyse non seulement la forte dépendance de la Chine au pétrole saoudien, mais aussi la longue histoire de quinze siècles de relations de la Chine avec l’Islam et le Monde arabe (lire « Chine et Terre d’Islam. Un millénaire de géopolitique  » Emmanuel Lincot, PUF, 2021), le contournement de l’Amérique par un tronçon des « Nouvelles routes de la soie » dans une zone stratégiquement instable où fermentent de violentes tensions culturelles entre les Musulmans et Israël, autre allié clé de Washington.

Durant son séjour, Xi Jinping a également assisté aux sommets des pays du Golfe et des pays arabes réunis à son intention. Ne perdant jamais de vue la rivalité systémique avec Washington, il a saisi l’occasion de ces rencontres pour faire la promotion du paiement en Yuan des importations chinoises de pétrole en augmentation rapide.

Plus largement, Xi tire opportunément profit de l’ébranlement des plaques tectoniques du monde de l’après-guerre organisé autour de la prévalence occidentale et de l’Amérique.

Tandis que se propage l’idée du déclin de l’Occident, les États-Unis sont contestés par la Chine, la Russie, et la longue cohorte des « émergents », alchimie hybride entre les anciens pays du tiers-monde et les non-alignés dont New-Delhi est le porte-flambeau ambigu, à la fois solidaire de Pékin au sein des BRICS et farouchement suspicieux de ses stratégies d’influence, sur fond d’irréductibles tensions territoriales et de frontières avec la Chine enracinées dans l’héritage colonial britannique [1].

Note(s) :

[1Le 9 décembre, dernier jour de la visite de Xi Jinping à Ryad, un incident militaire a éclaté entre des unités indiennes et chinoises sur les hauteurs de l’Himalaya dans le secteur glacé et inhospitalier de l’Arunachal Pradesh. Lire : Chine - Inde, l’improbable réconciliation


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