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›› Editorial

Le Renminbi accède au cercle fermé des monnaies de référence du FMI

Le 30 novembre 2015, Christine Lagarde annonçait l’inclusion du RMB à compter du 1er octobre 2016 dans le panier des monnaies de référence du FMI. Sa valeur pour le calcul des Droits de Tirage Spéciaux (DTS) sera supérieure à celle du Yen et de la Livre Sterling.

Les 1er et 2 décembre, tous les médias chinois ont célébré la nouvelle, annoncée le 30 novembre par une conférence de presse de Christine Lagarde, d’inclure le Renminbi dans le panier des monnaies de réserve du FMI servant de références pour le calcul des droits de tirage spéciaux (DTS) [1].

La mesure annoncée par Question Chine en avril dernier sera effective au 1er octobre 2016. Quel que soit l’angle de vue, la décision du FMI, rendue possible par un assouplissement de la position américaine après la détente en août des règles de calcul du taux change du RMB, constitue un succès pour le régime, symbole de la montée en puissance du pays, de son intégration dans le système financier international et de son ouverture.

La satisfaction des autorités chinoises est encore augmentée par le fait que le poids relatif du Yuan dans le panier des monnaies de réserve sera de 10,92%, avant le Yen japonais (8,3%) et la Livre Sterling (8,1%), ce qui fait de la devise chinoise la 3e monnaie de référence globale, après l’Euro (30,9%) et le Dollar (41,7%). Le 2 décembre, un article du Global Times signé de Li Wei, professeur associé à l’Institut des Études internationales de l’Université Renmin, faisait l’inventaire des bénéfices à attendre de la reconnaissance internationale du RMB.

Après le succès de la Banque Asiatique pour les Investissements d’Infrastructure, l’entrée du RMB dans le cercle très fermé des monnaies de réserve du FMI est une nouvelle victoire significative de la diplomatie financière chinoise comparable à l’admission de la Chine à l’OMC en 2001.

Elle rehausse la crédibilité du Yuan, accélèrera son utilisation dans les transactions commerciales globales et contribuera à remodeler le système financier mondial. Mais, prévient Li Wei, s’il est vrai que l’événement confère au RMB un statut et un pouvoir nouveaux, il implique aussi une exigence de transparence et des responsabilités nouvelles pour contribuer à la stabilité du système financier international où la Chine ne pourra plus se contenter de n’être qu’un spectateur.

Persistance des réflexes de fermeture et des obstacles corporatistes.

Surtout l’article estime que l’accès du RMB au statut prestigieux de monnaie de référence sera aussi une incitation à l’approfondissement des réformes financières et qu’elle aidera à bousculer les intérêts corporatistes qui y faisaient obstacle. En faisant allusion à la nécessaire poursuite de l’ajustement du système financier chinois, l’article met le doigt sur une réalité : tout comme en 2001, en entrant dans l’OMC, la Chine ne s’était pas complètement conformée aux critères du libre marché – mais elle était loin d’être la seule dans ce cas – en 2015, elle n’a pas non plus complètement réalisé les conditions d’ouverture de son compte de capital exigées par le FMI (cf. la note n°1).

Pour autant les 8 membres du conseil d’administration du FMI (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Grande Bretagne, Chine, Russie, et Arabie Saoudite), Christine Lagarde et Washington qui, avec ses droits de vote de 16,75% et son pouvoir d’influence sur ses alliés japonais, anglais et arabes avait les moyens de bloquer la promotion du RMB, ont estimé que, même si Pékin continuait à strictement contrôler les flux financiers entrant et sortant de Chine, la Banque Centrale avait, depuis 2009, sans cesse encouragé l’utilisation du Yuan à l’étranger [2] grâce à des accords monétaires bilatéraux.

Les effets de cet élan furent doubles. Il protégea les exportateurs chinois contre les risques financiers de changes trop volatiles et rehaussèrent le rôle du RMB dans le commerce international. Dans le même temps, les banques publiques chinoises ouvrirent des succursales autorisées à accepter des dépôts en RMB ou à compenser des transactions commerciales effectuées en monnaie chinoise, dans 9 centres internationaux à Hong Kong, Macao, Taipei, Singapour, Londres, Francfort, Paris, Séoul et Toronto

Enfin, le FMI et la mouvance américaine pouvaient d’autant moins ignorer ces réalités qu’après 2001 la Chine s’est hissée au 1er rang des puissances commerciales de la planète et qu’il y a quelques années Pékin avait consacré 43 Mds de $ pour recapitaliser le FMI, tandis que, grâce aux accords financiers bilatéraux, la monnaie chinoise devenait la 4e devise du commerce international avec 2,5% des échanges globaux libellés RMB, il est vrai très loin derrière le Dollar (45%) et l’Euro (28%).

Le 30 novembre dernier, la décision du FMI d’inclure le RMB dans son panier de référence, reconnaissait ces évolutions, auxquelles il faut ajouter la vague irrésistible des financements chinois hors FMI et Banque Mondiale, au moins si l’on en croit les annonces chiffrées de Pékin : 50 Mds de $ pour l’AIIB ; 40 Mds de $ pour le fond des « nouvelles routes de la soie » ; 50 Mds de $ pour la nouvelle banque des BRICS lancée en juillet 2014 (lire notre article Les BRICS jettent un pavé dans la mare des finances mondiales). Au total près de 150 Mds de $ proposés par la Chine alors que la plupart des émergents sont mécontents du fonctionnement des institutions mondiales classiques contrôlées par les États-Unis et leurs alliés.

En même temps, Christine Lagarde soulignait les efforts consentis par les autorités chinoises pour réformer leur système financier et monétaire et formulait l’espoir, comme nombre de commentateurs chinois, que « l’approfondissement des réformes permettra de consolider le système financier international qui, en retour, fournira les bases de la croissance et de la stabilité de la Chine dans l’économie mondiale. » En filigrane, la déclaration qui pointait du doigt la nécessaire poursuite des efforts, reconnaissait que le RMB n’obéissait pas complètement aux critères d’une monnaie de référence.

Note(s) :

[1Le DTS n’est pas une monnaie, et il ne constitue pas non plus une créance sur le FMI. Il peut en revanche représenter une créance virtuelle sur les monnaies librement utilisables des pays membres du FMI. Dans le système financier international le DTS joue, depuis l’abandon de l’étalon or, aussi le rôle de réserve complémentaire et d’unité de compte pour le FMI et plusieurs autres organisations internationales.

Depuis que l’or n’est plus la référence internationale, sa valeur, affichée chaque jour sur le site du FMI, est déterminée par calcul en fonction des valeurs du dollar, de l’euro, du yen et de la livre sterling. A partir du 1er octobre 2016, ce « panier de monnaies » de réserve inclura aussi la monnaie chinoise, le RMB. La liste des monnaies de référence n’est pas immuable. Mais le FMI exige qu’elles soient librement convertibles entre elles, cotées de façon continue et disponibles pour des transactions sur les marchés internationaux des capitaux sans aucun contrôle des changes ni limitation de montant.

[2A la date du 22 mai 2015, la Chine a signé 31 accords financiers permettant de libeller les échanges hors dollar, en RMB ou en monnaie locale. Dans l’ordre de signature : Indonésie (2009), Ouzbékistan (2011), Emirats, Turquie, Ukraine (2012), Singapour, Brésil, Royaume Uni, Hongrie, Albanie, Islande, Union Européenne (2013), Nouvelle-Zélande, Argentine, Suisse, Mongolie, Sri Lanka, Corée du sud, Russie, Qatar, Canada, Hong-Kong, Kazakhstan, Thaïlande, Pakistan (2014), Surinam, Arménie, Australie, Afrique du Sud, Malaisie, Biélorussie (2015).

La valeur des montants autorisés (en RMB) varie entre 400 Mds avec Hong Kong, 360 Mds avec la Corée du Sud et 350 Mds avec l’UE, à 1 Mds avec le Surinam et la Biélorussie, en passant par 200 Mds avec l’Australie, la Grande Bretagne et le Canada. En Asie, la valeur des montants signale la hiérarchie des volumes d’échanges commerciaux avec la Chine.

On constate que Hong Kong tient le haut du pavé avec 400 Mds de RMB (60 Mds d’€). Ce chiffre indique que la R.A.S est la plaque tournante de nombre d’autres transactions dont certaines restent opaques y compris vers des comptes off-shore un des canaux de la fuite des capitaux contre laquelle la Chine se bat et qu’elle tente de freiner en contrôlant les mouvements sortant. Suivent : la Corée du Sud (360 Mds), Singapour (300 Mds), la Malaisie (180 Mds), l’Indonésie (100) et la Thaïlande (70 Mds).


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