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›› Editorial

La gloire du Parti et de Xi Jinping

Défi lancé à l’Occident trop critique de la Chine.

Incidence remarquable unanimement relevée par les commentateurs occidentaux, Xi qui s’adressait à l’effervescence nationaliste que l’appareil attise sans réserve depuis 2012 et dont la dynamique s’est accélérée à l’automne 2017, lors du 19e congrès du Parti, à l’aune de la pensée de rupture des « caractéristiques chinoises  », a prononcé les mots les plus brutaux jamais officiellement sortis de la bouche d’un dirigeant chinois.

Après avoir brièvement sacrifié à l’exigence « d’amabilité » que lui-même avait recommandé à l’appareil le 31 mai dernier « dans le même temps, nous sommes désireux de tirer les leçons des réalisations d’autres cultures et nous accueillons volontiers les suggestions utiles et les critiques constructives », il a sérieusement raidi son discours.

« Le peuple chinois est épris de justice mais n’est pas intimidé par la menace. En tant que nation, nous avons un fort sentiment de fierté et de confiance. »5...)

« Nous n’avons jamais intimidé, opprimé ou soumis le peuple d’un autre pays, et nous ne le ferons jamais. De la même manière, nous ne permettrons jamais à aucune force étrangère de nous intimider, de nous opprimer ou de nous subjuguer.不允许任何外来势力欺负, 压迫, 奴役 我们 ».

« Quiconque voudrait le faire s’écrasera dans un bain de sang contre la Grande Muraille d’acier érigée par plus de 1,4 milliard de Chinois ! 谁妄想这样干, 必将在14亿多中国人民用血肉铸成的钢铁长城面前碰得头破血流 ».

*

Dès lors la route est tracée. Devenue la 2e économie de la planète, la Chine, toute entière confondue avec le Parti dont le magistère sur le pays est vital pour son avenir, doit suivre sa route vers la renaissance, en n’oubliant jamais que le combat pour l’indépendance et la souveraineté nationale n’a pas de fin ; en gardant en mémoire le vieil adage selon lequel « seuls les bons forgerons fabriquent les meilleurs aciers ».

Ici, prêchant pour sa paroisse et la prévalence du magistère du Parti, Xi laissa percer la crainte de la désunion et des mises en cause internes. «  Nous devons restés déterminés à améliorer la conduite du Parti, à maintenir son intégrité tout en luttant contre la corruption et en éliminant les éléments pouvant nuire à l’avancée du Parti à sa nature, à sa pureté et à sa santé. »

Durcissant la posture internationale de la Chine, Xi Jinping cherche aussi l’adhésion interne des Chinois par l’efficacité de ses politiques sociales en faveur de l’extrême pauvreté et – avec moins de succès de la petite classe moyenne urbaine - ; il tire aussi profit des remarquables performances de l’aménagement du territoire dont le dernier et spectaculaire exemple en date est le TGV vers le Tibet, long de 435 km avec ses 47 tunnels et 121 ponts.

En même temps, il exprime une absence de souplesse politique rarement observée à ce niveau, même en Chine : « les médias doivent aimer le Parti refléter sa volonté, sauvegarder son autorité et son unité. Ils doivent le protéger et s’aligner étroitement à sa pensée, sa direction politique et son action. ».

Crispations contre les allogènes du Xinjiang et contrecoups.

Aux marches allogènes du pays, l’obsession d’unification normative à l’aune des seuls critères matériels de progrès économiques et sociaux provoque des excès de répression et de contrôle policier. Ces derniers sont encore aggravés par la crainte d’une sécession culturelle exacerbée par la hantise des métastases djihadistes importées d’Asie centrale et d’Afghanistan (lire : La Chine et le péril du « Djihad »).

La férocité implacable du Parti et de la police armée populaire engagés dans une entreprise verticale et sans fin de mise aux normes des Ouïghours provoque en retour une réaction anti-chinoise multiforme des pays occidentaux dont les critiques sont attisées par la mouvance transnationale du « Uyghur Human Rights Project.

Sur ce sujet, un des plus tristes exemples de la brutalité sans nuance de l’appareil est la condamnation à la prison à vie en 2014 du professeur ouïghour Ilham Tohti. Lire : Condamnation à la prison à vie d’un intellectuel ouïghour

*

David Shambaugh, l’ancien éditeur de la revue académique de sinologie « China Quaterly  » qui, jusqu’en 2015, avait librement ses entrées dans le cercle des chercheurs chinois, invité par le régime y compris aux séminaires confidentiels peu ouverts aux étrangers de l’École Centrale du Parti, estime que le mandat à la tête de l’appareil de Xi Jinping qui a mis fin à la règle de Deng Xiaoping d’une direction collégiale et supprimé la limitation à deux mandats du Président, constitue un franche rupture avec ses prédécesseurs.

Ayant remis à l’honneur une « techno-autacracie neo-maoïste  » ultra centralisée, il développe une stratégie extérieure d’affrontement qui réduit à néant l’espoir que la multiplication des échanges entre les universitaires, les sociétés civiles et les diplomates pourraient combler en partie le fossé avec les États-Unis et l’Occident.

Animé par le rêve messianique de redonner à la Chine sa puissance, y compris en fustigeant l’Occident responsable des humiliations infligées par l’Occident au XIXe siècle, Xi a aussi contribué à élargir vers l’étranger la tendance exacerbée du Parti à calibrer toutes ses initiatives selon un principe normatif.

Pour promouvoir l’image de la Chine à l’extérieur, le Département du Front Uni richement doté en budget et en personnels, développe une propagande globale portant le projet des Nouvelles routes de la soie et du socialisme aux caractéristiques chinoises.

A l’occasion et si nécessaire, les diplomates chinois utilisent le levier du commerce et de l’accès au marché chinois pour obtenir un avantage géostratégique.

La conséquence de cette prévalence accordée à la force est que, pour la première fois depuis 1989, la Chine qui garde cependant nombre d’alliés en Afrique, au Moyen Orient et dans une longue suite de pays en développement, est l’objet d’une défiance parfois hostile des États-Unis et de la plupart de leurs alliés occidentaux, y compris dans son voisinage direct à New-Delhi, à Séoul, à Tokyo et, avec nuances à Hanoï et quelques autres pays de l’ASEAN.

A propos des alliés de la Chine, voir notre article de juillet 2019 : Controverses globales autour du traitement des Ouïghour. Pékin rallie un soutien hétéroclite et brouille la solidarité des musulmans.


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